Que faire quand mon enfant mord ?

Nos tout-petits mordent en collectivité ! Comment interpréter ces comportements et comment réagir ? 

Par Muriel Rolhion – Directrice des crèches des Montchatons

 

Quand un évènement de « morsures » ou griffures » a endommagé la main, le bras ou le dos d’un enfant, le professionnel  informe le parent.  C’est un moment délicat que nous connaissons lorsque l’enfant vit en collectivité, comme dans les crèches des Montchatons.

Souvent il produit des réactions différentes. Un parent dira « c’est normal à cet âge, il ne comprend pas » un autre « il ne faudrait pas que cela se reproduise » ou encore « donnez moi le nom de l’enfant qui a mordu » et encore- « nous éduquons notre enfant à ne pas mordre, les parents de cet enfant sont irresponsables ».

Mais  posons nous la question : pourquoi l’enfant mord-il ? Et comment répondre à cet acte de morsure ?

Mordre : de nombreuses raisons …

Aussi il est important de savoir que le tout petit enfant jusqu’à 2 ans et demi voire 3 ans n’a pas conscience de l’Autre comme sujet.

Tant qu’il ne dira pas « je » en parlant de lui, il ne fait pas de distinction. Lorsque l’enfant joue, il convoite le jouet d’un autre enfant, ce jouet l’attire et l’enfant va vouloir s’en saisir. S’il se confronte à de la résistance et bien, il peut mordre l’enfant pour obtenir l’objet de son désir. L’enfant est à cet âge- là dans ce que Bettelheim nomme « le principe de plaisir ». 

L’enfant n’a, lorsqu’il mord, aucune conscience de ce que peut ressentir l’autre enfant, il est totalement centré sur l’objet désiré. Son cerveau n’est pas suffisamment mature pour analyser la situation comme nous en tant qu’adulte  agissant dans « le principe de réalité ».

Pourquoi la morsure ? 

Aussi, l’action de mordre relève d’un geste naturel issu de la succion très présente à cet âge-là (de la naissance à 3 ans). Mordre est une étape avant l’acquisition du langage, l’enfant est en tension, ne pouvant pas mettre des mots sur ses émotions, il les exprime par la morsure, c’est une forme de communication, elle lui permet de libérer ce trop-plein de tension.

En fait, le bébé découvre « le monde » par la bouche, il met à la bouche les jouets mis à sa disposition, il les explore, les évalue, les mémorise…

Les émotions sont souvent à l’origine du comportement de morsure du tout petit. La colère est une des causes, c’est le moyen pour l’enfant de l’exprimer.

Paradoxalement, la morsure est un moyen de dire combien l’Autre est important, pour lui, la morsure signifie l’attention portée à l’Autre, la morsure a une fonction exploratoire ; «je l’aime à croquer » « il est croquant », d’ailleurs, combien de parents mordillent les petits pieds de leur enfant, quand il ne mettnt pas le pied de leur enfant dans le bouche et le bout des petits doigts, toute une symbolique !!! que nous ne développerons pas ici 😊

Aussi, vers 2 ans, c’est la période d’opposition de l’enfant, il l’exprime par la morsure, il est à la recherche de son affirmation face à l’Autre, il défend son territoire, il prend conscience des réactions liées à ses agissements sur l’environnement.

Ainsi, le sentiment de frustration est aussi une émotion que vit l’enfant en collectivité, elle peut s’exprimer par une griffure, une morsure, l’enfant est encore loin d’avoir acquis les codes sociaux, parfois elle est une forme d’apprentissage du « pouvoir » sur l’Autre. Vers 3 ans, l’enfant commence à prendre conscience qu’il est une personne à part entière.

La place de l’adulte dans une situation de morsure :

L’observation des comportements des enfants permet de comprendre, d’évaluer les intentions de l’enfant. Les moments de la journée sont des indicateurs à prendre en compte, le temps du passage des parents, le matin et particulièrement le soir, les temps de transition entre deux activités, un temps parfois vécu comme angoissant pour l’enfant. Il est alors important de se poser les questions du Pourquoi ? Quand ? Comment ? Qui ?

A partir de l’analyse de situation, proposer une alternative positive :

Et si on proposait un câlin pour remplacer la morsure assimilée à un sentiment affectif ?

Avec des mots posés sur une émotion « négative » ou « frustrante », l’adulte cherche à faciliter l’expression des émotions de l’enfant, il peut être contenant afin de rassurer l’enfant qui est en train de vivre une émotion forte qu’il ne peut identifier, il peut aider l’enfant à se diriger vers d’autres sources de plaisirs, d’autres jeux par exemple. 

Donc, il est Inutile de stigmatiser l’enfant sur l’acte lui-même, il est plus essentiel d’amener l’enfant à identifier ses « états émotionnels » et apporter des réponses adaptées. L’adulte va guider l’enfant vers des propositions constructives et des interactions positives.

En conclusion, les réactions des adultes au quotidien auprès des enfants permettent à l’enfant d’être sensibilisé à la vie collective, une pseudo vie sociale avec ses codes.

Un accompagnement positif et apprenant permet à l’enfant d’acquérir l’estime de soi à partir de ses expérimentations.